Caractérisation éthologique de l’émotivité chez le cercopithèque de Brazza (Cercopithecus neglectus) [ - Université de Rennes Accéder directement au contenu
Article Dans Une Revue Revue de Primatologie Année : 2009

Ethological characterization of emotivity in the de Brazza's monkey (Cercopithecus neglectus)]

Caractérisation éthologique de l’émotivité chez le cercopithèque de Brazza (Cercopithecus neglectus) [

Résumé

The understanding of the functioning of social groups implies knowledge of the individual characteristics. There are several levels of considering the interindividual differences, the most complex corresponding to the study of the temperament dimensions (Budaev, 1997). Our study takes place at this level and is based on a comparative ethological approach of the temperament according to Bates’ definition (1989). We investigated more specifically one of the main features of this one: the emotivity, defined as the predisposition inherited from the autonomous nervous system, allowing to react in a particularly strong and long-lasting way to certain classes of stimuli (Archer 1973). Most of the studies on emotional reactions are based on only one type of test, in which only few kind of behaviours are recorded (Bouissou et al., 1994). But emotivity domain is complex; it includes, among others, both aspects of gregariousness (Kilgour, 1975 ; Jones, 1977, 1987) and neophobia. We conducted this study on a species of non human primates, De Brazza’s monkey (Cercopithecus neglectus), which tends to be very gregarious and reacting a lot to social isolation (Joly 2000). We tested 5 adult individuals coming from two different social groups on two experimental tests: (1) aspects of gregariousness of the emotional reaction were studied using a test of social isolation, in which subjects were observed in their social group, partially isolated from their social group or totally isolated from their social group; (2) neophobic aspects were addressed with a test of reaction to unknown objects during which subjects were partially or totally isolated from their social group. Each test measured a component of the emotional reaction; an individual could be very gregarious and not much neophobic or conversely. Through these two experiments, we also tested the influence of social environment on emotivity, focusing on intra-individual variation according to the degree of social isolation. Thanks to the control situation, i.e. when subjects were tested within their social groups, individual profiles were drawn up, the five tested subjects presenting persistent individual characteristics through the various observation sessions. In partial social isolation, main behavioural changes were found in environmental exploration, locomotion and vocalizations. However, the more the isolation degree increased, the more the individual profiles were divergent and it appeared a behavioural individualization according to the isolation degree. Various behaviours were modified by the test of reaction to novelty whereas they were not by the test of social isolation; those changes are the “real” responses to the novelty, exempted by the influence of the social isolation. We highlighted three types of behavioural responses: (1) an important neophobia characterized by a lot of threatening vocalizations toward the unknown object and very few approaches; (2) less threats and more approaches of the new object and (3) few or no reaction toward the object. Therefore, besides these results, our study raises the importance of paring both experiments on social isolation and reaction to novelty to be able to isolate the specific reaction to the novelty.
Comprendre le fonctionnement des groupes sociaux implique une connaissance des caractéristiques individuelles. Il existe plusieurs niveaux de réflexion dans l’étude des différences interindividuelles, le plus complexe correspondant à l’étude des dimensions du tempérament (Budaev, 1997). C’est à ce niveau que se place notre investigation qui se base sur une approche éthologique comparative du tempérament tel que l’a définit Bates (1989). Nous nous intéresserons plus précisément à l’un des principaux traits de celui-ci : l’émotivité, définie comme la prédisposition héritée du système nerveux autonome permettant de réagir de façon particulièrement forte et durable à certaines classes de stimuli (Archer 1973). La plupart des études sur la réactivité émotionnelle n’utilisent qu’un seul test, au cours duquel n’est enregistré qu’un nombre limité de comportements (Bouissou et al., 1994). Or, le monde des émotions est complexe, englobant , entre autres, les aspects du grégarisme (Kilgour, 1975 ; Jones, 1977, 1987) et de la néophobie. Nous avons mené cette étude sur une espèce de primates non humains, le cercopithèque de Brazza (Cercopithecus neglectus), présentant une très forte tendance au grégarisme et réagissant fortement à l’isolement social (Joly 2000). Nous avons testé 5 individus adultes issus de deux groupes sociaux différents dans deux tests expérimentaux : (1) les aspects du grégarisme de la réaction émotionnelle ont été abordés par un test d’isolement social durant lequel les sujets ont été observés au sein de leur groupe social, en isolement partiel et en isolement total ; (2) les aspects de néophobie ont été étudiés à travers un test de réaction à un objet nouveau pendant lequel les sujets étaient isolés partiellement ou totalement de leur groupe social. A travers ces deux expériences, nous avons pu également tester l’influence de l’environnement social d’un individu (présence ou absence de congénères) sur son degré d’émotivité. En présence de congénères, des profils individuels ont pu être dressés, les cinq sujets testés présentant des caractéristiques individuelles persistantes à travers les différentes sessions d’observation. Suite à un isolement social (expérience 1), les modifications comportementales les plus marquantes chez la majorité des individus, portent sur les comportements d’exploration de l’environnement, les comportements locomoteurs et l’émission de vocalisations. Toutefois plus le degré d’isolement augmente, plus les profils individuels divergent ; il apparaît ainsi une individualisation du comportement avec le degré d’isolement. Lors du test de réaction à la nouveauté (expérience 2), certaines catégories de comportement se sont trouvées modifiées alors qu’elles ne l’étaient pas lors du test d’isolement social. Ce sont ces modifications comportementales qui peuvent être considérées comme réponse à la nouveauté sans biais de l’isolement social. Nous avons pu distinguer trois types de réaction à un objet nouveau : (1) une néophobie importante avec beaucoup de vocalisations de menace vis-à-vis de l’objet mais peu d’approche ; (2) une certaine « curiosité » avec des individus qui restent menaçants mais présentent plus d’approche et d’exploration de l’objet ; et enfin (3) une réponse plus modérée avec très peu de réactions face à l’objet nouveau. En conclusion des profils individuels d’émotivité chez le singe de Brazza ont pu être établi grâce à deux tests expérimentaux, ces profils divergeant avec le degré d’isolement social. De plus, cette étude soulève l’importance de coupler les expériences (isolement social et réaction à la nouveauté) afin de pouvoir mettre en évidence la réaction spécifique à la nouveauté sans biais de l’isolement social.
Fichier principal
Vignette du fichier
Meunier_et_al_-_Primatologie-2009.pdf (337.98 Ko) Télécharger le fichier
Origine : Fichiers éditeurs autorisés sur une archive ouverte
Loading...

Dates et versions

hal-01320575 , version 1 (05-09-2019)

Identifiants

Citer

Hélène Meunier, Philippe Bec, Catherine Blois-Heulin. Caractérisation éthologique de l’émotivité chez le cercopithèque de Brazza (Cercopithecus neglectus) [. Revue de Primatologie, 2009, 1, pp.1-20. ⟨10.4000/primatologie.154⟩. ⟨hal-01320575⟩
107 Consultations
64 Téléchargements

Altmetric

Partager

Gmail Facebook X LinkedIn More