Reconnaissance de parentèle chez un insecte grégaire Blattella germanica (L.)
Abstract
La reconnaissance de parentèle est un mécanisme qui permet aux individus, lors d’une interaction,
d’évaluer leur degré d’apparentement avec les congénères. La reconnaissance se fait soit par le biais de signaux
appris au contact des individus familiers (reconnaissance par association), soit par le biais de signaux
génétiquement déterminés (reconnaissance par comparaison phénotypique). Elle peut être suivie d’une
discrimination comportementale des congénères apparentés, en fonction du contexte de la rencontre et du rapport
coûts/bénéfices qui en résulte. Chez les insectes, de tels systèmes de reconnaissance ont été mis en évidence, en
particulier chez les espèces eusociales (Isoptères, Hyménoptères) où il est bénéfique d’avoir des comportements
altruistes envers les congénères les plus apparentés. Dans ces systèmes, la reconnaissance de parentèle joue un rôle
central dans la structuration et l’organisation des colonies.
Pour la première fois, nous avons testé l’hypothèse d’un mécanisme de reconnaissance de parentèle chez
une espèce présociale, Blattella germanica (L.). Cette blatte vit en larges agrégats constitués d’individus fortement
apparentés, avec un chevauchement des générations. Dans un tel système, la reconnaissance de parentèle pourrait
influer sur la fréquence des accouplements entre individus apparentés mais également sur la répartition spatiale
dans individus au sein des groupes. En tests de choix binaire, les adultes s’accouplent préférentiellement entre
congénères non-apparentés (non-frères/non-soeurs), évitant ainsi les croisements incestueux et les risques liés à la
consanguinité. A l’inverse, les larves s’agrégent préférentiellement dans des abris contenant des congénères
apparentés (frères/soeurs). Les blattes reconnaissent donc le degré d'apparentement de leurs congénères et adaptent
leur comportement en fonction du contexte: choix du partenaire sexuel ou choix du site d’agrégation. Nos résultats
indiquent également que la discrimination est basée sur des signaux génétiquement déterminés, indépendamment de
toute association par familiarité, suggérant une reconnaissance par comparaison phénotypique. Une reconnaissance
basée sur les profils d'hydrocarbures cuticulaires est à envisager.